lundi 13 décembre 2010

Comprendre les enjeux des retraites complémentaires

  • Le contexte. La négociation sur les régimes complémentaires de retraites entre le Medef, la CGPME, l'UPA et les cinq confédérations syndicales de salariés a démarré le 25 novembre 2010, sur fond d'adoption de la réforme des retraites dont l'entrée en vigueur est prévue en juillet 2011.
Les faits. Les régimes complémentaires Agirc et Arrco constituent au moins le tiers du montant global des pensions que perçoivent les retraités et plus de la moitié de celles des cadres. Les conditions de liquidation des retraites complémentaires sont négociées entre patronat et syndicats. quelque 28,7 millions de personnes sont concernées par l'accord actuel qui arrive à son terme le 31 décembre 2010 et aurait dû être renégocié.
Les enjeux. Si aucun accord n'intervenait d'ici à la fin de l'année, les salariés ne pourraient plus faire liquider leur retraite complémentaire sans abattement avant l'âge de 65 ans.


Agirc-Arrco, quésaco ?
Le deuxième étage du système de retraite français est constitué des régimes de retraites complémentaires obligatoires. L'Arrco (Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés), pour tous les salariés du privé, et l'Agirc (Association générale des institutions de retraites des cadres), pour les cadres, sont des régimes de retraite complémentaire. C'est-à-dire qu'ils viennent en complément du régime de base de la retraite.
La retraite Arrco concerne 17,529 millions de salariés et 11, 216 millions de retraités, dont aussi 3,9 millions de salariés et 2,4 millions de retraités qui relèvent de l'Agirc. Ce sont des organismes de droit privé gérés paritairement par le patronat et les organisations syndicales. Ils fonctionnent sur la base de la répartition : un système solidaire dans lequel les cotisants financent non par leur future retraite, mais celle des retraités actuels. Ce faisant, ils acquièrent des droits pour leur propre retraite. C'est en 1947 qu'est née l'Agirc.
Pour sa part, la CGT qui était partie prenante de sa création entendait ne pas laisser une partie du salariat (l'encadrement) recourir à la capitalisation pour financer sa retraite. La création de l'Arrco date quant à elle de 1961.
Les fédérations Agirc et Arrco sont présidées alternativement par les organisations patronales et syndicales. Il est cependant à noter que, malgré sa représentativité, la CGT n'a jamais présidé l'une ou l'autre fédération, de même qu'elle ne préside encore aucune des multiples commissions de l'Agirc et de l'Arrco.
Cette gestion paritaire contraint patronat et syndicats à conclure des accords à échéances régulières. Agirc et Arrco ont aussi la particularité d'être des régimes par points.


Régime par points : comment ça marche ? Le salarié cotise tous les mois, et chaque année les cotisations versées sont converties en points. Le montant des cotisations versées dans l'année est divisé par le prix d'achat du point (le prix d'achat du point est aussi appelé salaire de référence). Ainsi, on accumule des points tout au long de la carrière et au moment de la liquidation (quand le salarié demande à prendre sa retraite), on multiplie le nombre de points acquis tout au long de la carrière par la valeur de service du point. On obtient ainsi la pension annuelle. Le montant de la pension trimestrielle est le montant de cette pension annuelle divisé par quatre. Contrairement aux régimes de base, le fonctionnement par points des complémentaires les rend indépendants des notions de durée de cotisation ou d'âge de la retraite. Ils génèrent donc de fait une certaine opacité sur le niveau des futures pensions. Dans sa réflexion sur la réforme, le Conseil d'orientation des retraites s'est notamment penché sur les régimes par points. La question de la mise en place d'un régime unique par points pourrait revenir sur la table en 2013, à l'occasion du débat qui devrait s'engager sur une réforme systémique. Or, l'exemple du fonctionnement d'un régime par points nous est déjà donné en France au travers des régimes complémentaires. La CGT est très critique sur un système qui assure plutôt moins de lisibilité quant aux droits des salariés.


Qu'est-ce que l'AGFF ?
En 1982, le gouvernement abaisse l'âge de la retraite à 60 ans pour ceux qui ont une carrière complète (à l'époque 37,5 années de cotisation). Si le repère des 60 ans est acquis pour les régimes de base, le patronat n'accepte pas de l'appliquer aux régimes complémentaires pour lequel l'âge de la retraite sans abattement demeure à 65 ans. Une solution transitoire est trouvée avec en 1983, la création d'un fonds spécifique, l'ASF (Association pour la structure financière). Ce fonds a pour objet de financer la retraite à 65 ans sans abattement sur les retraites complémentaires, dès l'instant où le salarié a acquis une retraite complète dans son régime de base. Techniquement, un abattement est toujours calculé pour la retraite. Agirc-Arrco des salariés qui liquident leur retraite avant 65 ans, mais c'est l'ASF qui verse le complément. Reconduit à plusieurs reprises, l'ASF est devenue AGFF (Association pour la gestion des fonds de financement de l'Agirc et l'Arrco) en 2001. Depuis sa création, le patronat menace sans cesse de faire disparaître l'AGFF et intensifie le chantage à chaque échéance de l'accord. Une non-reconduction pourrait en effet induire une baisse allant jusqu'à 22 % du montant des retraites complémentaires. Lors des dernières négociations, en 2009, l'AGFF a été simplement reconduite pour un an avec une échéance à fin 2010. La donne se complique cette année avec le report de l'âge légal à 62 ans qui devrait s'appliquer progressivement à compter du 1er juillet 2011. Le patronat pourrait être tenté de "simplifier" en proposant d'aligner les règles des complémentaires sur les 62 ans (âge légal de départ à la retraite prévu par la réforme) et 67 ans (âge où ne n'appliquent plus les décotes pour trimestres de cotisation manquants) début juillet. Simplification n'est pas raison, et la CGT n'est pas favorable à une telle solution qui acterait de fait un recul historique. En effet, si dans un contexte de progrès social il n'a pas été décidé d'aligner l'âge légal des complémentaires de 65 à 60 ans en 1982, pourquoi aujourd'hui serait-il obligatoire d'aligner les complémentaires pour accompagner une logique de recul de société ?


Sur quoi portent les négociations en cours ?
La valeur du point
Le prix d'achat du point et la valeur de service du point sont deux éléments essentiels de la négociation. Le prix d'achat du point est ce qui permet de convertir les cotisations en points, tandis que la valeur de service du point est ce qui permet de reconvertir les points en euros ((le montant de la pension). Le troisième élément fondamental est le rapport entre le prix d'achat du point et la valeur de service du point, lequel constitue le rendement instantané des régimes. Le Conseil d'orientation des retraites constate que ce rendement est en chute libre. En effet, c'est un mécanisme à deux poids et deux mesures qui s'applique depuis plusieurs années. Le prix d'achat du point est indexé sur la base du salaire moyen, tandis que la valeur du point de service est indexée sur les prix. Il en résulte un décrochage des pensions avec moins de points (et de niveau de pension) accordés pour le même niveau de salaire à la liquidation, mais aussi moins de revalorisation de ces mêmes pensions. Ce décrochage ne cesse de s'amplifier avec le temps. "Un salarié qui liquide sa retraite avec un taux de remplacement de 70 % de son revenu d'activité, atteint 44 % de ce même revenu d'activité vingt ans plus tard", commente Gérard Rodriguez, conseiller confédéral de la CGT sur les questions de la retraite.
L'âge
L'autre paramètre à prendre en compte : l'âge au-deçà duquel s'appliquent les abattements. L'AGFF permet d'obtenir une retraite complémentaire sans abattement lorsque le salarié a ouvert des droits à une retraite à taux plein dans son régime de base. Quid de la situation où l'âge légal de départ à la retraite passe de 60 à 62 ans, et l'âge du taux plein de la retraite de 65 à 67 ans ? Sans doute, le patronat voudra-t-il faire passer aussi de 65 à 67 ans l'âge auquel le salarié peut prétendre à sa retraite complémentaire sans abattement. La CGT s'opposera évidemment à cette lecture en exigeant au moins le maintien de cette disposition.
Les solidarités entre régimes
Les droits familiaux et conjugaux. C'est tout ce qui concerne les enfants et la réversion. Ils existent dans les complémentaires avec des règles différentes du régime de base. Par exemple, la majoration pour trois enfants à l'Arrco est de 5 % (contre 10 % dans le régime de base), tandis qu'à l'Agirc, elle est de 8 % pour trois enfants auxquels s'ajoutent 4 % pour chaque enfant supplémentaire. La CGT souhaite une amélioration et harmonisation par le haut des droits conjugaux et familiaux dans les deux régimes. Le patronat estime quant à lui que les solidarités n'auraient pas leur place dans un régime de retraite par points, ces solidarités devant être assumés par les impôts. "Pourtant, si on prend la situation des femmes, les différences déjà importantes dans les régimes de base sont aggravées dans les régimes complémentaires. Les différences de pension sont de 41 % en Arrco et 60 % en Agirc . Sortir les mesures solidaires, qui concernent le plus souvent des femmes, accroîtrait encore ces écarts au lieu de les réduire".


Ce que la CGT va porter durant les négociations
Ce qui est en jeu, c'est le niveau des pensions, les solidarités dans les régimes et l'âge à partir duquel on bénéficie d'une retraite à taux plein. En résumé, il s'agit des mêmes enjeux que ce qui a fait l'objet des débats lors de la réforme gouvernementale. La CGT va donc défendre exactement les mêmes positions.
  • la nécessité de servir à chaque retraité un niveau de pension convenable, soit 75 % du revenu d'activité pour une carrière complète. Ceci s'entend avec une part pour le régime de base et une part pour le régime complémentaire, l'addition des deux devant faire 75 % à minima ;
l'indexation du prix d'achat du point et de la valeur de service du point sur le salaire moyen. ceci afin de maintenir le rendement instantané des régimes et d'assurer l'évolution des pensions sans perte relative de pouvoir d'achat ;
une garantie minimale de points (GMP) dans chaque régime complémentaire afin d'assurer une complémentaire minimale à chaque salarié. Cette disposition, qui existe pour l'Agirc (mais pas dans l'Arrco) fait l'objet d'attaques régulières de la part du patronat.
Le financement devra être mis sur la table, car sans augmentation des ressources, l'accroissement du nombre de retraités conduira mécaniquement à une baisse des pensions. C'est pourquoi la CGT souhaite un élargissement de l'assiette des cotisations (à l'intéressement, aux stock-options), la révision des exonérations de cotisations sociales patronales, la taxation des revenus financiers des entreprises et la modulation de la cotisation en fonction des salaires et de la valeur ajoutée des entreprises. Une question qui reste évidemment liée à celle de la politique de l'emploi et des salaires.
La CGT défend aussi l'idée de la création d'une orientation qu'elle a adoptée lors de son dernier congrès. Pour résumer, il s'agit d'une nouvelle institution visant à garantir durablement les droits à la retraite des salariés et pérenniser notre système par répartition. Elle gérerait les règles de solidarité régissant les relations entre régimes (compensation entre régimes et utilisation du Fonds de réserve des retraites). Sans affecter les identités des différents régimes, cette maison commune de la retraite organiserait les solidarités autour d'un socle commun de droit, et notamment celui d'une garantie du taux de remplacement au moins égal à 75 % du revenu d'activité.

Salaires : 2011 sera encore pire

Alors que les revendications salariales inondent les entreprises et que des économistes pro-libéraux demandent que les salaires augmentent au détriment des dividendes versés aux actionnaires qui, eux, progressent à une vitesse fulgurante, et bien les patrons préparent une nouvelle année noire pour les salaires.
Selon une enquête Cegos parue dans les Echos, le nombre d'entreprises pratiquant les augmentations générales de salaires continue de baisser sensiblement. Selon l'étude, seulement 38 % des DRH interrogés comptent procéder à des augmentations générales pour 2011, contre 48 % en 2010 et en 2009, et 52 % en 2008. Une large majorité des DRH, 87 % veulent par ailleurs limiter les augmentations individuelles.

La Halde en danger !

La Haute Autorité de lutte contre les discriminations, la Halde, risque de ne plus parvenir jouer son rôle de dénonciation des discriminations de toutes sortes qui frappent les salariés et les citoyens de notre pays.
Le gouvernement va diluer la Halde dans une nouvelle instance limitant son intervention. Décryptage.
Elle est jeune, souvent efficace, et appuie là où ça fait mal. Au risque de déplaire fortement. Elle, c'est la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), créée il y a six ans par la loi du 30 décembre 2004 et devenue depuis une instance indépendante incontournable dans la société française. qu'on en juge : près de 80 % de ses recommandations ont été suivies par les tribunaux en 2009 ; plus de 10 000 réclamations ont en outre été recensées la même année. Sur le seul volet social, la Halde a permis d'engranger de nombreux succès en matière de lutte contre les discriminations sexuelles, raciales ou syndicales... De quoi d'ailleurs irriter nombre d'entreprises condamnées, et même le pouvoir. L'on se souvient à cet égard que l'institution avait jugé discriminatoire le fait de recourir aux test ADN pour établir les liens de filiation dans les familles étrangères. La Halde risque pourtant de ne plus poser problème aux employeurs indélicats ou aux institutions discriminantes. Un projet de loi organique créant un "défenseur des droits" a été en effet adopté par le Sénat en juin dernier. Ce défenseur des droits qui inclura la Halde dans son périmètre de compétence devrait également comprendre d'autres instances indépendantes telles que le défenseur des enfants, le médiateur de la République et la Commission nationale de déontologie de la sécurité, et pourrait être nommé au printemps 2011. Inspiré de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, ce projet vise en théorie à "renforcer les possibilités de recours non juridictionnel dont dispose le citoyen pour assurer la défense de ses droits et libertés". A ceci près que ce défenseur des droits sera chargé de traiter seul une multitude de dossiers (enfance, médiation...). "Plusieurs éléments de ce projet sont alarmants, note le comité consultatif de la Halde (*) qui appelle à signer une pétition. Le défenseur des droits déciderait seul de traiter ou non des pratiques discriminatoires, le projet ne faisant aucune place à la collégialité. On ignore qui pourra concrètement et selon quelles modalités saisir le défenseur, et si les pouvoirs de la Halde apparaissent maintenus, les conditions de son exercice ne sont pas garanties, le champ d'intervention est réduit, le risque est de toute évidence un infléchissement net de la politique de lutte contre les discriminations".

(*) Il comprend notamment divers membres d'associations et d'organisations syndicales comme la CGT

Discrimination syndicale : une démonstration éclatante

D'après cette étude, les délégués syndicaux seraient payés 10 % de moins en moyenne que leurs collègues non syndiqués (à caractéristiques égales : âge, sexe, ancienneté, expérience, diplôme, temps de travail). "Lorsqu'un salarié souhaite devenir délégué, l'employeur a deux solutions qui s'offrent à lui : "l'acheter" pour garantir la paix sociale ou le payer moins pour le décourager dans son action syndicale.
C'est généralement la deuxième option qui est privilégiée", affirme le doctorant en économie.
Deux arguments à l'appui de sa thèse. Le premier concerne les écarts de salaire constatés selon l'organisation syndicale représentée : un délégué CGT serait payé 20 % de moins que ses collègues non-syndiqués, son homologue de la CFDT toucherait 10 % de moins et celui de FO aurait un salaire identique. "Si les décharges horaires accordées aux délégués devaient expliquer les écarts de salaires, il ne devrait pas y avoir de distinction selon l'organisation syndicale", plaide Thomas Breda. "Quand on sait que la CGT est le syndicat le plus combatif en France au sein des entreprises, qu'il est à l'initiative du plus grand nombre de grèves, on peut en conclure que le syndicat qui négocie le plus durement est aussi le plus pénalisé", poursuit-il.
Le second argument s'appuie sur les différences observées au niveau des déroulements de carrière. "Si les délégués étaient moins bons, les écarts de salaire devraient se voir dès le début. Or, ils interviennent environ cinq ans après être devenus délégués, par le biais d'absence de promotion ou d'augmentation de salaires", indique encore Thomas Breda.

Les luttes menées par les syndicats CGT depuis plusieurs années ont permis de révéler l'ampleur de la discrimination syndicale qui frappe les militants CGT. Des centaines de dossiers ont abouti devant les prud'hommes. Des dizaines de millions d'euros sont sorties de la poche des patrons pour réparer le préjudice causé.
L'ampleur de la discrimination qui frappe les syndicalistes vient d'être confortée par une nouvelle étude réalisée par un doctorant à l'école d'économie de Paris, Mr Thomas Breda.
A partir des données de la Dares (Service du Ministère du Travail) portant sur les délégués syndicaux, notre chercheur montre que ces militants sont victimes de discrimination syndicale.
















Mobilisation syndicale européenne


Gandrange : rien ne va plus !