jeudi 14 février 2008

Le CODEG communique

Entretien de M. Grenaut au journal de l'Humanité :
Directeur des installations de Gandrange de 2002 à 2005, Alain Grenaut estime que le groupe ArcelorMittal doit s'expliquer :
"Huma : En janvier, au moment de l'annonce des suppressions d'emploi, vous affirmiez : "on peut sauver Gandrange." Le pensez-vous toujours ?
Oui. Avec un prix de revient raisonnable et une orientation sur des produits de qualité, c'est possible. On peut faire vivre l'usine en produisant bien, plûtot que beaucoup. Certes, le choix d'un four électrique bicuve (techniquement très complexe), en 1993-94 avait été une erreur.Mais les deux laminoirs et les deux coulées continues sont parfaits. Ils permettraient de faire évoluer la production vers des "produits nobles", à destination de l'automobile, par exemple. Plus généralement, quand on parle "valeur ajoutée" en sidérurgie, ce sont les hommes et les outils. Et les deux sont là.
Huma : Pourtant, le site a perdu 24,4 millions en 2006 et 36 millions en 2007. Que s'est-il passé ?
Il y a un point majeur que je ne m'explique pas. A mon époque, on "envoyait" entre 1,1 et 1,3 million de tonnes par an, dans des conditions plus difficiles qu'aujourd'hui puisqu'il y avait moins de fonte à disposition. Depuis l'acquisition d'Arcelor par Mittal (fin 2006), il y a toute la fonte qu'il faut mais le site ne dépasse pas le million de tonnes par an. Cela représente un déficit de production de 30% ! Si la chute avait été lente, j'aurais trouvé ça "normale". Mais là, c'est brutal. En 2005, le site gagnait encore de l'argent. A partir de 2006, il est devenu brusquement déficitaire. pourquoi ? Il est du devoir de la direction d'expliquer ce décalage.
Huma : On parle aussi de la perte de savoir-faire causées par la mauvaise anticipation des départs en retraite, l'arrivée massive de jeunes et le manque de formation.
On ne peut pas faire mine de s'étonner aujourd'hui de ce problème. Cela fait des années que l'on sait qu'il y a un manque latent d'effectifs ! Pendant ma gestion, tous les DRH en étaient conscients. Des plans d'embauche et de formation de grande envergure étaient d'ailleurs prévus. A Gandrange, il aurait suffit de tenir trois ou quatre ans en sureffectifs pour gérer au mieux la transmission des compétences.
Huma : Et cela n'a pas été fait... Vos propos vont dans le sens de l'intersyndicale (CFDT-CFE-CGC; CGT), qui parle de "mort programmé du site..."
Tuer un site industriel, c'est criminel. Et je refuse d'imaginer qu'un dirigeant ait fait cela intentionnellement. Je me garde donc d'émettre cette hypothèse.
Huma : L'idée d'un repreneur, avancée par le comité de défense dont vous faite partie, a été reprise par Sarkozy. Mais cette question divise l'intersyndicale. Qu'en pensez-vous ?
La CFDT et la CFE-CGC préfèrent rester dans le groupe Mittal. Elles estiment qu'en cas de fermeture du site, mieux vaut être dans une grande entreprise pour pouvoir être reclassé plus facilement. Je n'ai rien contre Mittal, mais je prends acte de sa volonté de fermer Gandrange. A partir de là, il faut chercher avec qui travailler.
Huma : Que proposez-vous ?
Grandrange pourrait rejoindre un groupe où des synergies sont possibles, comme Ascometal ou Saarsthal. Dans le cadre d'une éventuelle intervention de l'Etat, on pourrait imaginer une recapitalisation pour "refaire" Unimétal, plutôt que de mettre de l'argent dans un géant comme Mittal. Unimétal est une marque respectée aussi bien par les industriels que par les ouvriers."

Acierix vous salue

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