mardi 7 octobre 2008

Quatre questions sur la crise financière : la CGT répond

Pour Nicolas Sarkozy, la crise ne serait pas celle du capitalisme, mais celle d'un manque de régulation du système ?

Pour la CGT

Nous avons un désaccord de fond avec ce diagnostic. Il ne s'agit pas simplement d'un dérapage du système, qu'il faudrait compenser, et pour l'avenir empêcher les conséquences du fonctionnement de ce système. Cette crise est le produit des contradictions de la logique économique à l'œuvre. On ne peut pas faire pression en permanence sur l'emploi, les salaires, toutes les formes de rémunérations, y compris la protection sociale et les dépenses publiques sans, de l'autre côté, nourrir la croissance financière. Il y a bien une symétrie entre cette crise financière, déclenchée par les crédits immobiliers américains à risques et la crise sociale.
Ce qui est en cause, ce n'est pas seulement tel ou tel comportement plus ou moins répréhensible, du point de vue du droit ou de la morale : c'est le modèle économique et financier de croissance mis en place il y a un peu plus de vingt ans, à partir des Etats-Unis, et qui était censé nous apporter, avec la fin de l'histoire, un développement continu. En réalité, ces deux dernières décennies ont été marquées par trois crises monétaires et financières successives. Chacune a justifié des mesures de réglementation, ce qui n'a pas empêché que la bulle spéculative se reconstitue à chaque fois sur la base de cette déflation salariale.

Nicolas Sarkozy dit "on a financé le spéculateur plutôt que l'entrepreneur"

Pour la CGT

Il faut remplacer le "on" par une analyse des choix publics qui ont été faits ces dernières années et la désignation de leurs responsables. Quand on réduit les prélèvements fiscaux sur les ménages les plus aisés, quand on "aide" l'entreprise sans contrôle, quand on privatise l'ensemble des institutions financières, et quand on a un Etat qui, de plus en plus, se nourrit du produit de ces privatisation, il ne faut pas dire "on" assiste à la financiarisation, mais "les gouvernements" ont contribué à ce que la bulle financière, qui explose maintenant, se développe.

On dit qu'il faut réhabiliter le rôle de l'Etat en matière économique

Pour la CGT

Qu'il faille une intervention publique, aucun économiste sérieux ne le niera. Après tout, le marché est quelque chose d'organisé par la puissance publique. La vraie question est de savoir à quoi sert l'intervention publique. Aujourd'hui, on la justifie pour éviter l'effondrement du système. L'intervention publique va certes contenir la crise, mais au prix d'une injection de liquidités et de fonds publics sans précédent. Il est clair que s'il n'y a pas un développement économique et social parallèle, ces masses financières fantastiques vont venir accroître de manière exceptionnelle la valeur des actifs. On aura un rebond de la croissance financière et on ira vers la quatrième crise.

Les solutions proposées tournent autour du besoin d'imposer de nouvelles règles aux banques

Pour la CGT

La régulation en soi ne résout pas les problèmes. On l'a vu lors des crises précédentes : après chaque crise, il y a eu un mouvement de régulation. On a simplement déplacé les comportements d'un secteur financier, où ils ne pouvaient plus se développer aussi librement, à un secteur dérégulé. Plus on réglementait un secteur, plus on apportait d'argent ailleurs. La réglementation n'est pas inutile, mais elle ne peut marcher que si elle se combine avec des réponses aux questions du développement de l'économie réelle, des activités productives de biens et de services. D'où l'enjeu d'une régulation qui intègre ces préoccupations. Doit-on, par exemple, continuer à prêter de l'argent au même taux lorsqu'il est destiné à une opération purement financière et lorsqu'il est destiné à investir dans le développement de la production énergétique, de la construction automobile plus respectueuse de l'environnement, de la formation professionnelle ou de l'emploi ? La sélectivité du crédit serait le moyen de réarticuler réglementation et développement de l'économie réelle.

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